La discipline sans menaces 


Lorsque j’ai commencé à éduquer mes enfants à la maison, j’ai rapidement remarqué un rétressissement marqué de mon espace vital. Mes enfants étaient omniprésents. Soudainement, nous étions ensemble toute la journée. Et la soirée. Et la fin de semaine aussi. Il nous fallait apprendre à vivre ensemble et à respecter l’espace de chacun. Pas une tâche facile dans une famille grand format.

Le respect de l’espace vital de chacun ne se fait pas qu’au plan physique: il faut aussi apprendre à se traiter avec respect minute après minute, heure après heure. Je dis souvent à la cantonade qu’il est impossible d’élever des enfants sans pots-de-vin — et je ne parle pas d’un verre de rouge après l’heure du coucher — mais pour plusieurs d’entre nous, les menaces plutôt que les promesses sont la pierre angulaire de notre approche disciplinaire. Sur les forums Internet que je fréquente, les approches basées sur les menaces ou le retrait de privilèges foisonnent. Pendant longtemps, j’ai souscrit à ces approches, préférant faire référence aux “conséquences” d’une action plutôt qu’à une punition.

J’ai rapidement appris que nos jeunes enfants (et même nos adolescents!) n’avaient pas assez de contrôle sur leur environnent pour que notre approche disciplinaire puisse reposer sur les conséquences naturelles d’une action. Pensez-y. Un enfant joue près du four, un enfant désobéi et va jouer dans la rue, un enfant mord un autre enfant. Les conséquences naturelles de ces actions sont physiquement ou emotivement inatteignables. Qui va laisser son enfant se brûler sévèrement ou se faire frapper par une voiture par acquis de discipline? Et pour la morsure, les remords et la perte d’un ami sont à plusieurs années de faire une différence. Il arrive souvent aussi que les conséquences naturelles soient trop onéreuses pour la famille ou se résument à punir toute la famille pour les actions d’une petite personne. C’est le cas lorsque nous promettons à bout de nerf d’annuler Noël, un voyage à Disney ou de quitter le resto sur le champ. Nous devons tous nous rabattre sur des conséquences inventées pour faire une impression: retrait de privilèges, isolation, confiscation de jouets, privation de dessert.

Cette approche a plus ou moins de succès selon le tempérament de nos enfants et le notre évidemment. Certain enfants choisiront toujours la “conséquence” histoire de garder le contrôle sur une situation qui leur échappe. Certains parents passeront rarement aux actes histoire d’éviter un face-à-face explosif. L’appel aux conséquences est d’une utilité limitée, surtout lorsque celles-ci sont inventées et doivent être mises-en-œuvre par les parents. L’utilité des conséquences naturelles est leur renforcement naturel, sans avoir recours aux discours, à la répétition et à la punition. La conséquence inventée (par exemple, range ta vaisselle sale ou perd ton tour de PS3) doit être imposée par le parent tout comme les mesures punitives. C’est donc une punition déguisée en conséquence.

Un autre problème avec le recours aux menaces et à la perte de privilèges, particulièrement dans le contexte de l’instruction en famille, c’est que la plupart de nos enfants mènent une vie dans laquelle le privilège est partie intégrante, c’est-à-dire qu’il est difficile d’isoler le privilège pour pouvoir l’enlever. Au jour le jour, une fois que nous avons retiré le privilège d’écran ou le dessert, peut-être une sortie chez un ami ou une fête d’anniversaire, on arrive à bout de munitions. Mes enfants perdent souvent leur privilège de télévision ou leur iPod avant 9:00 du matin. Lorsqu’on manque de “conséquences”, on doit se rabattre sur notre autorité toute simple. Et c’est ainsi que je me suis rendu compte que mon autorité, sans menaces, était plutôt mince.

C’est ainsi que je me suis embraquée dans un défi de discipline sans menaces.

J’imagine que vous attendez que je vous admette que tout marche à merveille ou que tout a foiré? Ni l’un ni l’autre. C’est une aventure à long terme. Mais je peux vous dire que nous avons beaucoup de chemin à faire avant d’arriver à un résultat tangible. La discipline interne est le travail d’une vie, si j’en crois mon expérience.

Le rodage ne s’est pas fait sans frictions. Libérés du contrôle artificiel qu’imposaient les “conséquences”, la fratrie est graduellement tombée dans le chaos le plus total. Le travail d’école est tombé en friche et le niveau de criage, d’insultes et de chamaillage ont atteints un nouveau record (ce qui n’est pas peu dire). Mon autorité ne tenant qu’à un fil, je suis devenue irascible, impatiente et généralement irrationnelle. La conclusion de mon expérience de discipline sans menaces était déprimante d’une manière ou d’une autre: soit je devais remettre les menaces au menu, soit je devais me déclarer vaincue et à la merci de mes enfants.

Avec un peu de recul et de réflexion, j’ai réalisé que le recours aux menaces me permettais de ne pas imposer de limites strictes, d’encadrement ferme. Une fois au bout du rouleau, je n’avais qu’à brandir  le retrait de privilèges pour que les choses se placent. J’ai appris que sans menaces, je devais être beaucoup plus claire et prévisible quand il en venait aux attentes et aux limites. Éliminer les menaces me forçait à être à la fois plus tendre et plus ferme. J’ai du établir des règles de conduite dans la maison — autant au niveau du comportement que de l’espace physique — que je dois faire respecter sans exception sous peine de me perdre dans l’anarchie. D’une certaine manière, c’est un style de vie plus restrictif qu’avant mais j’ai espoir qu’avec un peu de temps et beaucoup de pratique nous allons arriver à un point d’équilibre. En somme, j’essaie d’être moins “réactive”, c’est-à-dire que je n’attends pas d’être en face d’une situation critique avant de réagir. J’essaie de ne pas me rendre au bout du rouleau. J’y arrive en ayant recours aux routines et aux séquences, en baissant le volume pour garder le calme et en n’ayant pas les yeux plus gros que la panse au niveau de la discipline. Je prends un bouchée à la fois, un changement à la fois, et je mâche et remâche jusqu’à ce que le morceau soit passé.

Heureusement, j’ai l’occasion de pratiquer souvent!

 

 

 

Discipline sans menaces 


Lorsque j’ai commencé à éduquer mes enfants à la maison, la première chose que j’ai remarquée fut l’omniprésence de mes enfants. Soudainement, nous étions ensemble toute la journée. Et la soirée. Et la fin de semaine aussi. Il nous fallait apprendre à vivre ensemble et à respecter l’espace vital de chacun. Pas une tâche facile dans une famille grand format.

 Le respect de l’espace vital de chacun ne se fait pas qu’au plan physique, il faut aussi apprendre à se traiter avec respect minute après minute, heure après heure. Je dis souvent à la cantonade qu’il est impossible d’élever des enfants sans pots-de-vin — et je ne parle pas d’un verre de rouge après l’heure du coucher — mais pour plusieurs d’entre nous, les menaces plutôt que les promesses sont la pierre angulaire de notre approche disciplinaire. Sur les forums Internet que je fréquente, les approches basées sur les menaces ou le retrait de privilèges foisonnent. Pendant longtemps, j’ai souscrit à ces approches, préférant faire référence aux “conséquences” d’une action plutôt qu’à une punition.

J’ai rapidement appris que nos jeunes enfants (et même nos adolescents!) n’avaient pas assez de contrôle sur leur environnent pour que notre approche disciplinaire puisse reposer sur les conséquences naturelles d’une action. Pensez-y. Un enfant joue près du four, un enfant désobéi et va jouer dans la rue, un enfant mord un autre enfant. Les conséquences naturelles de ces actions sont physiquement ou emotivement inatteignables. Qui va laisser son enfant se brûler sévèrement ou se faire frapper par une voiture par acquis de discipline? Et pour la morsure, les remords et la perte d’un ami sont à plusieurs années de faire une différence. Il arrive souvent aussi que les conséquences naturelles soient trop onéreuses pour la famille ou se résument à punir toute la famille pour les actions d’une petite personne. C’est le cas lorsque nous promettons à bout de nerf d’annuler Noël, un voyage à Disney ou de quitter le resto sur le champ. Nous devons tous nous rabattre sur des conséquences inventées pour faire une impression: retrait de privilèges, isolation, confiscation de jouets, privation de dessert.


Cette approche a plus ou moins de succès selon le tempérament de nos enfants et le notre évidemment. Certain enfants choisiront toujours la “conséquence” histoire de garder le contrôle sur une situation qui leur échappe. Certains parents passeront rarement aux actes histoire d’éviter un face-à-face explosif. L’appel aux conséquences est d’une utilité limitée, surtout lorsque celles-ci sont inventées et doivent être mises-en-œuvre par les parents. L’utilité des conséquences naturelles est leur renforcement naturel, sans avoir recours aux discours, à la répétition et à la punition. La conséquence inventée (par exemple, range ta vaisselle sale ou perd ton tour de PS3) doit être imposée par le parent tout comme les mesures punitives. C’est donc une punition déguisée en conséquence.

Un autre problème avec le recours aux menaces et à la perte de privilèges, particulièrement dans le contexte de l’instruction en famille, c’est que la plupart de nos enfants mènent une vie dans laquelle le privilège est partie intégrante, c’est-à-dire qu’il est difficile d’isoler le privilège pour pouvoir l’enlever. Au jour le jour, une fois que nous avons retiré le privilège d’écran ou le dessert, peut-être une sortie chez un ami ou une fête d’anniversaire, on arrive à bout de munitions. Mes enfants perdent souvent leur privilège de télévision ou leur iPod avant 9:00 du matin. Lorsqu’on manque de “conséquences”, on doit se rabattre sur notre autorité toute simple. Et c’est ainsi que je me suis rendu compte que mon autorité, sans menaces, était plutôt mince.


C’est ainsi que je me suis embraquée dans un défi de discipline sans menaces.

J’imagine que vous attendez que je vous admette que tout marche à merveille ou que tout a foiré? Ni l’un ni l’autre. C’est une aventure à long terme. Mais je peux vous dire que nous avons beaucoup de chemin à faire avant d’arriver à un résultat tangible. La discipline interne est le travail d’une vie, si j’en crois mon expérience.

Le rodage ne s’est pas fait sans frictions. Libérés du contrôle artificiel qu’imposaient les “conséquences”, la fratrie est graduellement tombée dans le chaos le plus total. Le travail d’école est tombé en friche et le niveau de criage, d’insultes et de chamaillage ont atteints un nouveau record (ce qui n’est pas peu dire). Mon autorité ne tenant qu’à un fil, je suis devenue irascible, impatiente et généralement irrationnelle. La conclusion de mon expérience de discipline sans menaces était déprimante d’une manière ou d’une autre: soit je devais remettre les menaces au menu, soit je devais me déclarer vaincue et à la merci de mes enfants.

Avec un peu de recul et de réflexion, j’ai réalisé que le recours aux menaces me permettais de ne pas imposer de limites strictes, d’encadrement ferme. Une fois au bout du rouleau, je n’avais qu’à brandir  le retrait de privilèges pour que les choses se placent. J’ai appris que sans menaces, je devais être beaucoup plus claire et prévisible quand il en venait aux attentes et aux limites. Éliminer les menaces me forçait à être à la fois plus tendre et plus ferme. J’ai du établir des règles de conduite dans la maison — autant au niveau du comportement que de l’espace physique — que je dois faire respecter sans exception sous peine de me perdre dans l’anarchie. D’une certaine manière, c’est un style de vie plus restrictif qu’avant mais j’ai espoir qu’avec un peu de temps et beaucoup de pratique nous allons arriver à un point d’équilibre. En somme, j’essaie d’être moins “réactive”, c’est-à-dire que je n’attends pas d’être en face d’une situation critique avant de réagir. J’essaie de ne pas me rendre au bout du rouleau. J’y arrive en ayant recours aux routines et aux séquences, en baissant le volume pour garder le calme et en n’ayant pas les yeux plus gros que la panse au niveau de la discipline. Je prends un bouchée à la fois, un changement à la fois, et je mâche et remâche jusqu’à ce que le morceau soit passé.

Heureusement, j’ai l’occasion de pratiquer souvent!

 

 

 

La saison des anniversaires


This post titled “Birthday Season” is about our birthday parties or lack thereof

Je n’ai jamais été une grande “fan” des fêtes d’enfants, sans doute parce que les anniversaires dans notre famille sont concentrés entre janvier et juin. Ç’a l’air de rien comme ça mais une fête d’enfant toute simple à la maison peut coûter une centaine de dollars et taxer la logistique familiale. Avec deux fêtes en janvier, une en février, une en mars, deux en avril et une en juin, ça fait une différence dans notre budget d’opération. Cette année, la saison des anniversaires est tombée pile sur le dernier trimestre de ma grossesse et les fêtes d’anniversaire ont “pris le champ” comme on dit… Les enfants, surtout les plus jeunes, ont posé quelques questions mais s’en sont, en somme, très bien tirés.

Nous avons la chance d’avoir ce que j’appelle “a-party-in-a-box”… c’est-à-dire que notre famille suffit. Depuis que les enfants sont tout petits, nous prenons le temps de décorer une chaise et de placer leurs cadeaux à leur place à table. Les plus vieux sont désormais assez grands pour décorer les chaises et la décoration a pris un ton nettement “ado” — lire “sarcastique” — mais je ne m’en plain pas (trop).

Lorsque les plus grands étaient petits, je m’inquiétais beaucoup de créer des traditions familiales qui passeraient le test du temps. Et maintenant, 18 ans plus tard, je réalise que les traditions se créent elles-mêmes, par le passage du temps. Les célébrations n’ont pas besoin d’être extravagantes pour être mémorables, en fait ce sont les traditions les plus simples qui prennent racine le plus facilement. Ce qui compte, c’est le temps que l’on prend pour les personnes qu’on aime.

 

Bienvenue été!


Notre famille célèbre l’arrivée de l’été avec un anniversaire et la promesse de journées moins pressées. Nous aimons nous retrouver à la plage le vendredi soir pour un picnic de fin de semaine. C’est une tradition de mon enfance dont je conserve d’excellents souvenir: les mamans et les enfants se dirigeaient en fin d’après-midi vers la plage du lac Meech et les papas nous rejoignaient après le travail. Puisque nous n’avions tous qu’une voiture, il fallait s’organiser. On achetait un sac de chip en chemin et on mangeait des oeufs durs. C’était une occasion de reconnecter avec nos amis, qui n’habitaient pas dans le même quartier et ne fréquentaient pas la même école, et notre famille. Ni nos voitures ni nos maisons n’avaient l’air climatisé et ces visites de soirée à la plage étaient notre refuge, notre rafraichissement. On conduisait les vitres baissées, le nez au vent, jusqu’aux limites du Parc de la Gatineau, on quittait la ville et l’asphalte trop chaude pour la remplacer par l’eau toujours fraîche du lac. J’habite maintenant trop loin du lac Meech pour en faire une escapade régulière et l’Île Pétrie a remplacé le parc de la Gatineau. Mais j’éprouve encore le même plaisir à fuir mon quartier de banlieue sans arbres le vendredi soir pour me retrouver au bord de l’eau. Voici quelques photos avec sous-titres de notre première sortie estivale. J’y ai inclue ma toute première tentative, après 2 mois, de  photo de famille avec les 9 enfants. Vous verrez si j’ai eu du succès! Si vous cliquez sur la première photo, vous pourrez toutes les voir en “diapo”.

 

 

Frères et soeurs – Première partie


This little blog has seen an influx of new visitors lately, thanks to the popularity of my blog post on large families and the environment. The post below, about sibling rivalry, is written in French. If French is all Chinese to you, please stay for the pictures and thanks for the visit!

Cheers,
Véronique

Ah, les frères et sœurs! La famille est un groupe qui se porte à une multitude de dynamiques, qu’elles soient positives ou qu’elles vous marquent au fer rouge. Les rapports avec les membres de notre famille nous forment, un peu comme le moule dans lequel on verse la pâte à gâteau : à la fois distincte du moule et soumise à son influence. On me pose souvent des questions sur les rapports entre frères et sœurs et j’ai plus d’une fois promis une publication à ce sujet. Quelle meilleure occasion que l’arrivée d’un nouveau petit dans la fratrie?

Lorsque je reçois des questions au sujet de la rivalité entre frères et sœurs, celles-ci viennent de deux camps. D’un côté, les adultes qui ont des relations harmonieuses avec leurs frères et sœurs et qui veulent s’assurer que leurs enfants grandissent dans la même harmonie, et de l’autre côté les adultes qui ont des relations difficiles – ou parfois complètement rompues – avec leurs frères et sœurs et qui veulent éviter que leurs enfants grandissent avec le même bagage. Étant issue de la première catégorie, je dois avouer que je n’ai jamais beaucoup réfléchi à la cause des relations harmonieuses (ou tendues) au sein d’une fratrie. Plusieurs litres d’encre ont été répandus sur des kilomètres de papier, les ouvrages de psychologie et d’auto-assistance ainsi que les livres d’instructions destinés aux parents ne manquent pas. De l’ordre de naissance aux signes astrologiques, les théories sur ce qui pourrait expliquer la fonction et la dysfonction familiale sont nombreuses. Je ne suis ni psychologue, ni gourou du « self-help », mais j’ai le privilège de voir grandir mes propres enfants et leurs interactions me poussent à la réflexion.

 

DSC_0238

Les jeunes parents qui s’apprêtent à accueillir un nouveau bébé se demandent souvent comment assurer une transition sans heurts pour leur aîné. Les parents qui vivent avec des jeunes enfants au jour-le-jour se demandent si les batailles et les insultes quotidiennes laisseront une marque indélébile sur la relation entre leurs enfants. Puisque mes enfants ont en moyenne 2 ans-et-demi d’écart, nos nouveaux bébés arrivent généralement à une époque où le plus jeune est encore très attaché à maman. Au cours de chaque grossesse, un ami proche ou un membre de ma famille exprime son inquiétude quant à la transition de l’ex-bébé. À chaque fois, malgré le stress qui marque invariablement tout changement de routine, la transition se fait bien. L’ex-bébé doit bien grandir et somme toute, il n’est pas toujours décommandé d’encourager cette maturation avec une petite poussée dans le derrière. DSC_0771

 

Dans notre famille, plutôt que de traiter l’arrivée d’un nouveau petit comme un traumatisme pour les enfants, nous préférons le voir comme un événement de la vie normale. Après tout, les femmes sont fertiles de l’adolescence à l’âge d’or. La capacité d’avoir 2 enfants parfaitement planifiés entre l’âge de 30 et 34 ans n’est qu’un résultat des avances de la contraception. La reproduction humaine suggère que l’avènement de plusieurs frères et sœurs sur un certain nombre d’années est la norme biologique plutôt que l’exception.

DSC_0029

Nous voyons donc l’arrivée d’un nouvel enfant comme un enrichissement et non comme un appauvrissement. Bref, nous portons notre regard sur ce que l’enfant ajoute à la vie de famille et non sur ce qu’il enlève. L’être humain est un animal social pour lequel l’organisation en communauté est une question de survie. Notre famille est notre première communauté, celle qui nous apprend à vivre en société. C’est la raison pour laquelle les blessures mentales et émotives qui nous sont infligées par une famille dysfonctionnelle sont celles qui laissent les cicatrices les plus cuisantes. L’harmonie entre les membres d’une famille est l’état d’équilibre et d’harmonie auquel nous aspirons. La discorde familiale est un état dysfonctionnel pour lequel de nombreux adultes cherchent un remède à grands coups de thérapies.

DSC_0136

Les enfants ne naissent pas avec un désir de discorde. Les enfants sont une page blanche à qui nous enseignons, par nos mots, nos gestes et nos attitudes, ce qui est normal, désirable. Au cours de mes conversations avec des enfants devenus adultes, j’ai appris que les querelles et rivalités à long terme, celles qui persistent au-delà des chicanes d’enfants et qui survivent à la maturation, prennent souvent racine dans les attitudes des parents envers leurs enfants. C’est pourquoi lorsqu’on me pose des questions sur la rivalité entre frères et sœurs, je préfère éviter les solutions faciles telles « demander aux visiteurs de dire bonjour au plus grand avant de dire bonjour au bébé » ou encore « d’acheter un cadeau au plus grand plutôt qu’au bébé. » En fait, ces suggestions ne sont pas mauvaises mais elles ne feront pas de différence. C’est la maîtrise de nos émotions en tant que parent et la capacité de contrôler l’expression de notre frustration, de nos préférences et de nos propres blessures qui vont faire la différence.

 

Nos enfants sont les acteurs de leurs propres vies. Nous en sommes les metteurs-en-scène.

Fin de la première partie.

 

La menace du nombre


Il y a environ un mois, notre famille a fait l’objet d’une chronique dans notre journal local. Ce n’est pas la première fois que j’apparais avec ma petite bande sur les pages d’un journal : l’année dernière, j’avais participé à un article sur la décision de retourner au travail ou de rester à la maison pour le Globe & Mail.

Quand vous êtes mère de famille nombreuse et que vous vous pointez le nez dans les média, il faut vous attendre à ce que les trolls du réchauffement climatique soient au rendez-vous, peu importe le sujet de l’article. Nous serions un bien piètre exemple à suivre : si tout le monde faisait comme nous, l’impact environnemental serait désastreux. Peut-être en théorie, mais qu’en est-il de de la réalité?

Vous n’avez pas besoin d’être expert en démographie pour voir que les familles nombreuses ne sont pas à la source de la surpopulation de la planète. En assumant que vous acceptiez les arguments en faveur de la surpopulation. Car une lecture brève des titres à ce sujet démontre rapidement que les problèmes reliés au déclin démographique sont tout aussi pressants que ceux reliés à la surpopulation. Et que les problèmes d’allocation des ressources reliés à la surpopulation sont temporaires. Je m’explique. Une lecture rapide des statistiques sur les taux de natalité (nombre de naissances enregistrées au cours d’une année par 1000 habitants) et les taux de fertilité (nombre moyen d’enfants par femme au cours de leur vie, entre 15 et 50 ans) sont en déclin de par le monde. Bien que de nombreux pays sous-développés se trouvent encore au-dessus du taux de natalité qui assure le renouvèlement de leur population (2.1 enfants par femme), leur taux de natalité est en déclin. À la lecture des statistiques, il semble que l’augmentation de la population mondiale ne soit pas autant liée aux naissances trop nombreuses mais bien à l’augmentation de l’espérance de vie.  Autrement dit, nous n’avons pas soudainement commencé à nous reproduire comme des lapins, nous avons simplement arrêté de tomber comme des mouches. Le nombre de personnes âgées est à la hausse mais le nombre d’enfants est en déclin de par le monde.

Blâmer la surpopulation sur les familles nombreuses comme la nôtre ignore le fait que pour un pays comme le Canada, le taux de fertilité est bien en-dessous du taux de renouvèlement, malgré la poignée de familles nombreuses qu’on y retrouve. Pensez-y : le taux de fertilité de 1.1 enfant par femme inclue les femmes comme moi. Nous faisons donc une bien maigre différence. Au pire, nous rendons le déclin démographique un tout petit peu moins menaçant. Je rencontre parfois des petits comiques qui me disent : « Je suis bien content qu’il y ait des gens comme toi pour compenser pour les gens comme moi »… Sauf que nous ne faisons pas le poids : il y a encore trop de gens comme toi pour que les gens comme moi puissent compenser.

Certains me diront que le déclin de la population est souhaitable puisque notre bilan écologique est peu enviable. C’est vrai. Il est difficile de ne pas voir comment l’abus de ressources est néfaste pour l’environnement. Cependant, je vous dirais que  ce ne sont pas les gens qui tuent la planète mais les mentalités. Puisque les familles nombreuses ne sont pas assez nombreuses pour affecter le taux de natalité d’un pays, qu’est-ce qui vous fait penser qu’elles sont assez nombreuses pour détruire l’environnement? L’abus de ressources se produit en parallèle avec le déclin de la population. Le problème n’est pas seulement combien de personnes piétinent l’environnement, mais comment!

Notre famille vit  en banlieue d’Ottawa dans un quartier bien typique des banlieues aisées que l’on retrouve aux quatre coins du pays. Grosses maisons unifamiliales, 4 chambres à coucher, garage double. Deux voitures, ou plutôt une voiture et un véhicule de type utilitaire sport ou minivan. Notre maison est faite pour une famille de 4 ou 5 personnes. Autour de chez moi, dans des demeures similaires en taille et en fonction, il n’y a que des couples sans enfants ou avec 1 ou 2 enfants. Certaines familles sont jeunes et espère faire grandir leur famille mais la majorité sont plus âgés. Ils utilisent comme nous 3 000 pi. ca. de superficie, bâtie sur des terres autrefois agricoles, 2 véhicules, l’air climatisé et le chauffage alimenté à l’électricité produite par une centrale au charbon quelque part en Ontario. Il ne coûte pas plus cher de chauffer 3 000 pi. ca. pour une famille de 10 que pour une famille de 2. Sauf que la taille de ma famille et de mes factures font en sorte que par beau temps, on ouvre les fenêtres. La plupart de mes voisins allument la climatisation en mai et l’éteignent en octobre. Bien que ma pile de déchets soit plus grande que la leur, le camion se déplace autant pour eux que pour moi, et leur pile de déchets n’est pas le cinquième de la mienne, même si leur maisonnée l’est. Leurs 2 véhicules se déplacent remplis au quart, pas moins souvent que les miens remplis à craquer. Et alors que mes vacances de mars se passent à la maison, avec un petit voyage de 60 minutes à la pente de ski la plus proche, la moitié des copains d’école de mes enfants sont partis en avion vers une destination plus ensoleillée. Et vous me pointez du doigt?

Je vais vous dire ce qui détruit la planète. C’est l’égoïsme. C’est une culture de pouvoir qui nous pousse à prendre ce qui nous revient, que nous en ayons besoin ou non. C’est la recherche du « plus encore », pour ne pas dire du « trop ». Lorsqu’on se promène dans les anciens quartiers d’Ottawa et que l’on y voit des petits bungalows en brique de 2 ou 3 chambres à coucher, pas plus grands qu’un garage triple, on se rappelle d’une époque pas si lointaine où ces maisons étaient considérées d’une taille acceptable pour une famille… alors que les familles étaient plus grosses! Aujourd’hui, ma maison unifamiliale a deux chambres à coucher avec leurs propres salle-de-bains. Idéal pour l’ado unique qui préfère ne pas partager une toilette avec ses parents : vos enfants peuvent maintenant dormir, surfer et se doucher dans leur aile personnelle. Ils n’ont même plus besoin de sortir pour faire pipi. Il ne manque que la trappe à repas! Mais c’est moi, mon mari et mes enfants qui sont le problème?

De ma fenêtre de bureau à la maison, je regarde passer les autobus scolaires. À tous les jours, une maman bienveillante vient reconduire sa fille qui semble avoir environ 12 ans à l’arrêt d’autobus et revient l’y chercher à la fin de la journée en minivan. À Ottawa, un élève ne peut marcher plus de 500 m pour se rendre à son arrêt d’autobus. Si la distance entre son domicile et son point d’embarquement est de plus de 500 m, un nouveau point d’embarquement est créé. Tout au cours de cet hiver rigoureux, le plus froid qu’on ait connu depuis belle lurette, notre maman bienveillante est venue déposer sa fille à l’arrêt d’autobus. Sa fille ne portait jamais de tuque, de foulard ou de mitaines. Pas même une paire de bottes. On s’entend que dans un rayon de 500 m de ma fenêtre de bureau, il n’y a pas de logement à loyer modique. On ne parle pas d’un enfant mal habillé par nécessité mais bien d’un enfant qui ne peut pas marcher 500 m (sans doute moins) en hiver parce qu’il « fait trop froid ». Et il fait trop froid par choix. C’est ce genre de choix, fait à tous les jours, multipliés par quelque million d’entre nous, sur l’espace d’une vie, qui sont venu à bout de l’environnement. Pas une poignée de familles nombreuses.

Oui, on utilise trop d’électricité, on conduit trop souvent, on porte trop de vêtements, on amasse trop de cochonneries et on doit maintenant construire des espaces de rangements climatisés pour accueillir les choses dont nous n’arrivons pas à nous débarrasser. Vous pensez que ce sont les familles comme la mienne qui rendent Dymon Storage si profitable? Non contents de tapisser nos terres agricoles d’asphalte, nous construisons des appartements de banlieue pour nos choses, que nous devons ensuite conduire en voiture d’un bout à l’autre de la ville. On en est arrivé là alors que la population continue de décroitre. Serait-il possible que vous cherchiez votre coupable au mauvais endroit?

Pour ma part, je vais continuer à avoir des enfants et à les élever de manière à ce qu’ils deviennent des citoyens responsables. Je ne sais pas si je vais réussir : les forces sociales qui poussent à la surconsommation et au nombrilisme sont puissantes! Mais je crois que j’ai une meilleure chance de réussir parce que la famille nombreuse est un incubateur pour les valeurs que je cherche à inculquer à mes enfants. Vous devriez être contents : ce sont eux qui vont payer vos serviettes d’incontinence et remplacer vos hanches pour les 40 prochaines années.

Picture by Jenna Sparks, Lifestyle photographer: http://jsparksphotography.zenfolio.com/
Picture by Jenna Sparks, Lifestyle photographer: http://jsparksphotography.zenfolio.com/

La menace nombreuse


Il y a environ un mois, notre famille a fait l’objet d’une chronique dans notre journal local. Ce n’est pas la première fois que j’apparais avec ma petite bande sur les pages d’un journal : l’année dernière, j’avais participé à un article sur la décision de retourner au travail ou de rester à la maison pour le Globe & Mail.

Quand vous êtes mère de famille nombreuse et que vous vous pointez le nez dans les média, il faut vous attendre à ce que les trolls du réchauffement climatique soient au rendez-vous, peu importe le sujet de l’article. Nous serions un bien piètre exemple à suivre : si tout le monde faisait comme nous, l’impact environnemental serait désastreux. Peut-être en théorie, mais qu’en est-il de de la réalité?

Vous n’avez pas besoin d’être expert en démographie pour voir que les familles nombreuses ne sont pas à la source de la surpopulation de la planète. En assumant que vous acceptiez les arguments en faveur de la surpopulation. Car une lecture brève des titres à ce sujet démontre rapidement que les problèmes reliés au déclin démographique sont tout aussi pressants que ceux reliés à la surpopulation. Et que les problèmes d’allocation des ressources reliés à la surpopulation sont temporaires. Je m’explique. Une lecture rapide des statistiques sur les taux de natalité (nombre de naissances enregistrées au cours d’une année par 1000 habitants) et les taux de fertilité (nombre moyen d’enfants par femme au cours de leur vie, entre 15 et 50 ans) sont en déclin de par le monde. Bien que de nombreux pays sous-développés se trouvent encore au-dessus du taux de natalité qui assure le renouvèlement de leur population (2.1 enfants par femme), leur taux de natalité est en déclin. À la lecture des statistiques, il semble que l’augmentation de la population mondiale ne soit pas autant liée aux naissances trop nombreuses mais bien à l’augmentation de l’espérance de vie.  Autrement dit, nous n’avons pas soudainement commencé à nous reproduire comme des lapins, nous avons simplement arrêté de tomber comme des mouches. Le nombre de personnes âgées est à la hausse mais le nombre d’enfants est en déclin de par le monde.

Blâmer la surpopulation sur les familles nombreuses comme la nôtre ignore le fait que pour un pays comme le Canada, le taux de fertilité est bien en-dessous du taux de renouvèlement, malgré la poignée de familles nombreuses qu’on y retrouve. Pensez-y : le taux de fertilité de 1.1 enfant par femme inclue les femmes comme moi. Nous faisons donc une bien maigre différence. Au pire, nous rendons le déclin démographique un tout petit peu moins menaçant. Je rencontre parfois des petits comiques qui me disent : « Je suis bien content qu’il y ait des gens comme toi pour compenser pour les gens comme moi »… Sauf que nous ne faisons pas le poids : il y a encore trop de gens comme toi pour que les gens comme moi puissent compenser.

Certains me diront que le déclin de la population est souhaitable puisque notre bilan écologique est peu enviable. C’est vrai. Il est difficile de ne pas voir comment l’abus de ressources est néfaste pour l’environnement. Cependant, je vous dirais que  ce ne sont pas les gens qui tuent la planète mais les mentalités. Puisque les familles nombreuses ne sont pas assez nombreuses pour affecter le taux de natalité d’un pays, qu’est-ce qui vous fait penser qu’elles sont assez nombreuses pour détruire l’environnement? L’abus de ressources se produit en parallèle avec le déclin de la population. Le problème n’est pas seulement combien de personnes piétinent l’environnement, mais comment!

Notre famille vit  en banlieue d’Ottawa dans un quartier bien typique des banlieues aisées que l’on retrouve aux quatre coins du pays. Grosses maisons unifamiliales, 4 chambres à coucher, garage double. Deux voitures, ou plutôt une voiture et un véhicule de type utilitaire sport ou minivan. Notre maison est faite pour une famille de 4 ou 5 personnes. Autour de chez moi, dans des demeures similaires en taille et en fonction, il n’y a que des couples sans enfants ou avec 1 ou 2 enfants. Certaines familles sont jeunes et espère faire grandir leur famille mais la majorité sont plus âgés. Ils utilisent comme nous 3 000 pi. ca. de superficie, bâtie sur des terres autrefois agricoles, 2 véhicules, l’air climatisé et le chauffage alimenté à l’électricité produite par une centrale au charbon quelque part en Ontario. Il ne coûte pas plus cher de chauffer 3 000 pi. ca. pour une famille de 10 que pour une famille de 2. Sauf que la taille de ma famille et de mes factures font en sorte que par beau temps, on ouvre les fenêtres. La plupart de mes voisins allument la climatisation en mai et l’éteignent en octobre. Bien que ma pile de déchets soit plus grande que la leur, le camion se déplace autant pour eux que pour moi, et leur pile de déchets n’est pas le cinquième de la mienne, même si leur maisonnée l’est. Leurs 2 véhicules se déplacent remplis au quart, pas moins souvent que les miens remplis à craquer. Et alors que mes vacances de mars se passent à la maison, avec un petit voyage de 60 minutes à la pente de ski la plus proche, la moitié des copains d’école de mes enfants sont partis en avion vers une destination plus ensoleillée. Et vous me pointez du doigt?

Je vais vous dire ce qui détruit la planète. C’est l’égoïsme. C’est une culture de pouvoir qui nous pousse à prendre ce qui nous revient, que nous en ayons besoin ou non. C’est la recherche du « plus encore », pour ne pas dire du « trop ». Lorsqu’on se promène dans les anciens quartiers d’Ottawa et que l’on y voit des petits bungalows en brique de 2 ou 3 chambres à coucher, pas plus grands qu’un garage triple, on se rappelle d’une époque pas si lointaine où ces maisons étaient considérées d’une taille acceptable pour une famille… alors que les familles étaient plus grosses! Aujourd’hui, ma maison unifamiliale a deux chambres à coucher avec leurs propres salle-de-bains. Idéal pour l’ado unique qui préfère ne pas partager une toilette avec ses parents : vos enfants peuvent maintenant dormir, surfer et se doucher dans leur aile personnelle. Ils n’ont même plus besoin de sortir pour faire pipi. Il ne manque que la trappe à repas! Mais c’est moi, mon mari et mes enfants qui sont le problème?

De ma fenêtre de bureau à la maison, je regarde passer les autobus scolaires. À tous les jours, une maman bienveillante vient reconduire sa fille qui semble avoir environ 12 ans à l’arrêt d’autobus et revient l’y chercher à la fin de la journée en minivan. À Ottawa, un élève ne peut marcher plus de 500 m pour se rendre à son arrêt d’autobus. Si la distance entre son domicile et son point d’embarquement est de plus de 500 m, un nouveau point d’embarquement est créé. Tout au cours de cet hiver rigoureux, le plus froid qu’on ait connu depuis belle lurette, notre maman bienveillante est venue déposer sa fille à l’arrêt d’autobus. Sa fille ne portait jamais de tuque, de foulard ou de mitaines. Pas même une paire de bottes. On s’entend que dans un rayon de 500 m de ma fenêtre de bureau, il n’y a pas de logement à loyer modique. On ne parle pas d’un enfant mal habillé par nécessité mais bien d’un enfant qui ne peut pas marcher 500 m (sans doute moins) en hiver parce qu’il « fait trop froid ». Et il fait trop froid par choix. C’est ce genre de choix, fait à tous les jours, multipliés par quelque million d’entre nous, sur l’espace d’une vie, qui sont venu à bout de l’environnement. Pas une poignée de familles nombreuses.

Oui, on utilise trop d’électricité, on conduit trop souvent, on porte trop de vêtements, on amasse trop de cochonneries et on doit maintenant construire des espaces de rangements climatisés pour accueillir les choses dont nous n’arrivons pas à nous débarrasser. Vous pensez que ce sont les familles comme la mienne qui rendent Dymon Storage si profitable? Non contents de tapisser nos terres agricoles d’asphalte, nous construisons des appartements de banlieue pour nos choses, que nous devons ensuite conduire en voiture d’un bout à l’autre de la ville. On en est arrivé là alors que la population continue de décroitre. Serait-il possible que vous cherchiez votre coupable au mauvais endroit?

Pour ma part, je vais continuer à avoir des enfants et à les élever de manière à ce qu’ils deviennent des citoyens responsables. Je ne sais pas si je vais réussir : les forces sociales qui poussent à la surconsommation et au nombrilisme sont puissantes! Mais je crois que j’ai une meilleure chance de réussir parce que la famille nombreuse est un incubateur pour les valeurs que je cherche à inculquer à mes enfants. Vous devriez être contents : ce sont eux qui vont payer vos serviettes d’incontinence et remplacer vos hanches pour les 40 prochaines années.

Picture by Jenna Sparks, Lifestyle photographer: http://jsparksphotography.zenfolio.com/
Picture by Jenna Sparks, Lifestyle photographer: http://jsparksphotography.zenfolio.com/

Joyeux Noël!


Cette année pour les vacances de Noël, nous avons créé une patinoire sur l’étang derrière notre maison. Malgré le froid extrême, les enfants sortent patiner au moins deux fois par jour. Nous avons passé un Noël tout simple en famille. Alors que passent à la télé les annonces pour le cadeau parfait — une voiture, un cinéma maison, un voyage — nous retournons à la source avec des étrennes simples, des repas succulents et de quoi bâtir un héritage de bons souvenirs. Nous passons un bien joyeux Noël et nous vous souhaitons la même joie au cours de toute l’année.

Montée de lait d’une jeune femme rétrograde


Cette semaine, une amie anglophone m’a fait parvenir un article de L’Actualité intitulé Payer les mères à la maison pour que je lui en traduise l’idée générale. S’il y a des choses qu’on aimerait pouvoir « dé-lire », en voici une.

L’article part d’un récent sondage Leger-Marketing tenu auprès de familles québécoises :

L’été dernier, un sondage de Léger Marketing a permis de constater que, dans les deux tiers des familles québécoises, l’un des parents serait prêt à rester à la maison pour prendre soin des enfants d’âge préscolaire si l’État lui versait une allocation équivalente à la subvention qui est accordée pour une place en garderie subventionnée (CPE ou autre). On parle ici d’une subvention annuelle d’environ 9 000 dollars.

Devrait-on payer les femmes pour qu’elles restent à la maison? L’auteur explique qu’il s’agirait d’un projet inabordable, particulièrement à la lumière des finances publiques québécoises telles qu’elles sont. Bon, je me dis que les finances publiques n’empêchent pas le gouvernement québécois de poursuivre sa lancée avec les garderies à $7 qui, bien que populaires, ne sont pas exactement un investissement rentable au niveau fiscal.

Mais là où j’ai dû courir à la salle de bain (et ce n’est pas parce que je suis enceinte), c’est à la déclaration qu’il s’agirait d’une initiative rétrograde.

Pardon?

Payer les mères pour qu’elles restent à la maison irait aussi à l’encontre de plusieurs décennies d’efforts visant à améliorer la position des femmes à l’intérieur comme à l’extérieur du foyer.

Si j’ai bien compris, donner le choix aux familles d’utiliser la subvention pour les services de garde pour rester à la maison ferait perdre du terrain aux femmes et donnerait la permission aux hommes de se laver les mains des couches et des tâches ménagères. Parce qu’on sait que la seule raison pour laquelle les papas d’aujourd’hui sont impliqués dans le soin et l’éducation de leurs enfants, c’est parce que madame travaille. Encore une fois, pardon? D’après L’Actualité le progrès ne tient qu’à un fil : la garderie subventionnée. Et pourtant, à l’extérieur du Québec, des papas impliqués décident tous les jours d’être présents dans la vie de leurs enfants et d’appuyer leurs conjointes dans les tâches domestiques. Serait-ce la sagesse d’une génération de jeunes hommes qui ont été témoins d’une dynamique de couple laissant peu de place au père au sein du foyer? Serait-ce la sagesse d’une génération de femmes qui s’attendent à plus de la part de leur conjoint? Serait-ce la popularité croissante du maternage  et des théories de l’attachement qui suggèrent qu’un enfant a besoin de se sentir aimé et valorisé par ses parents afin de développer une bonne santé émotive et des relations saines? Bref, serait-ce une combinaison de facteurs historiques, sociaux et culturels qu’il serait difficile d’expliquer en un paragraphe?

Mais surtout, suis-je la seule jeune femme se pensant libérée qui a envie de mettre sa brassière en feu en lisant que si on donnait un choix aux femmes, elles pourraient l’utiliser à mauvais escient? Qu’il est donc préférable, pour leur bénéfice ma petite madame, de ne pas leur donner? L’auteur se pare du drapeau de la libération féminine en faisant preuve du paternalisme le plus bas. Bravo. Quand j’aurais besoin d’un homme pour me dire ce que je dois faire pour éviter de paraître rétrograde, je saurai où le rejoindre.

Ça m’a rappelé un incident de ma très jeune enfance, circa 1976. Je me suis ouvert le menton lorsque la roue avant de mon tricycle s’est prise dans une bouche d’égout mal fermée. Ma mère a voulu poursuivre la municipalité pour négligence mais a abandonné les procédures lorsque mon père a dû signer une autorisation lui permettant d’entamer une poursuite judiciaire.  Nier aux femmes la poursuite de leurs ambitions, même lorsque celles-ci se « limitent » à l’éducation de leurs enfants, c’est retourner à l’époque où les femmes devaient recevoir la permission de signer des documents importants et de gérer leurs finances personnelles. Leur dire que rester à la maison est un mauvais choix car elles pourraient le regretter dans l’éventualité d’un divorce, c’est substituer son intelligence à la leur. Le combat du féminisme n’était pas de donner aux femmes une palette de choix déterminés « progressistes » mais de leur donner l’autonomie de faire leurs propres choix. Les propos tenu par l’auteur de cet article m’inquiètent bien plus que mes copines qui renoncent à leur carrière pour rester à la maison.

Mais ce n’est pas tout. L’auteur va plus loin dans la substitution de son bon jugement à celui des femmes qui décident de rester à la maison en déclarant que les enfants doivent fréquenter la garderie pour y apprendre à vivre :

Une bonne garderie fait acquérir aux enfants des aptitudes cognitives, comme écouter, observer, parler, dessiner, compter, lire et écrire. Elle leur apprend aussi la patience, la persévérance, la responsabilité, la discipline, l’estime de soi, la capacité d’interagir avec les autres, la générosité et la maîtrise des émotions.

Y’a-t-il quelque chose d’utile que les enfants peuvent apprendre à la maison? La déclaration que les enfants doivent fréquenter une institution pour pouvoir développer ces habiletés particulières suggère qu’elles ne peuvent être acquises à la maison ou enseignées par les parents. Pousse mais pousse égal!  J’ai 8 enfants. Certains ont fréquenté une garderie jusqu’à leur entrée à l’école. D’autres sont restés à la maison avec moi. Aucun n’est plus vertueux que les autres à ces égards. En fait, j’ai toujours remarqué que l’entrée à l’école emportait une dégradation marquante du comportement de mes enfants. Tout d’un coup, ils se mettent à pousser pour avoir leur tour, à japper après leurs frères et sœur et à s’envoyer promener. Et pour ce qui est du développement du vocabulaire, on repassera merci : ils apprennent soudainement à sacrer. Il naît de l’école un stress et une impatience qui me surprennent toujours, même après 6 enfants. Pour ce qui est de la garderie, j’ai remarqué que certains enfants en garderie font preuves de discipline et de générosité et d’autres non. Serait-ce parce que finalement, c’est à la maison que ces apprentissages sont introduits et consolidés (ou non)?

Il est difficile de répondre à une déclaration à l’emporte-pièce par l’anecdote mais regardez autour de vous et dites-moi sans rire que les seuls enfants bien ajustés que vous connaissez sont issus d’un centre éducatif et que les seuls fuckés ont été élevés par des mères à la maison. Allez! Sans rire! Si l’auteur pense vraiment que les femmes ne sont pas à la hauteur de leurs propres petits, ce n’est pas surprenant qu’il ne les pense pas dignes de choisir quoi faire avec une potentielle subvention de services de garde.

Est-ce que l’état devrait payer les femmes pour qu’elles restent à la maison? Absolument pas! Au mieux, j’aimerais que les parents qui restent à la maison bénéficient d’un régime fiscal comparable à celui des parents qui travaillent. Par exemple, en permettant que la valeur du service de garde que les parents fournissent en restant à la maison puisse être déduite de leur revenu familial. Ou que le fractionnement du revenu (income splitting) soit permis pour les familles dont un parent reste à la maison. Je ne veux pas d’un chèque du gouvernement pour m’occuper de mes enfants. Parce que du chèque à l’inspection, il n’y a qu’un pas. Lorsque je paye ma femme de ménage, je m’attends à pouvoir lui dire quoi faire quand elle est chez moi. Et je n’accepterai jamais qu’un bureaucrate vienne fouiner chez moi pour voir si j’élève mes enfants d’une manière digne d’être payée. Votre enfant de 2 ans fait-il ses nuits madame? Il va falloir le laisser pleurer! Mes copines qui sont passées à travers un processus d’adoption savent à quel point les attentes d’un ministère quant à ce qui rend un parent digne peuvent être aussi frustrantes qu’illogiques. Je vais me passer du chèque et des interventions.

Je n’ai qu’à imaginer l’auteur de l’article dans le rôle de la police parentale. Gardez votre argent.